Au cours de notre pêche quotidienne aux informations dans l’océan du Net, nous avons sorti un étrange poisson : Paola LCT, une « influenceuse » suivie par un million de fans sur Instagram. Nous n’allons pas juger intellectuellement ou politiquement cette demoiselle, qui a la comprenette de son âge (15 ans), mais essayer de comprendre son succès que nous souhaitons long et durable dans une époque d’obsolescence programmée, pour les produits de l’industrie comme pour les êtres humains.

Thème de la vidéo de la Paola : « Donc je vais vous demander en story quels étaient vos préjugés parce que ça m’intéresse grave de savoir genre quelle image j’rejette, qu’est-ce que vous pensez de moi. »

Nous avons respecté les silences (quand il y en a) et la ponctuation dans le discours de l’influenceuse. En voici le verbatim tout ce qu’il y a de plus honnête :

« Et d’ailleurs sur Instagram j’ai posté plein de photos de mes vêtement et vous étiez grave nombreux à me demander “ouais bon où est-ce que t’as acheté ça, où est-ce que t’as acheté ça” donc du coup j’ai téléchargé l’application Twenty One Buttons j’vous en ai déjà parlé plein de fois parce que l’application elle est grave cool donc Twenty One Buttons c’est une application qui est un peu disposée comme Instagram donc c’est hypercool y a un fil d’actualités etc. et donc moi j’ai un compte mon compte c’est Paola LCT et sur ce compte-là je poste des photos de moi, donc c’est des photos qui sont généralement déjà posées sur mon Instagram, en fait mon application elle est grave cool parce que c’est des photos du coup de mes vêtements et sur mes vêtements-là y a des boutons – Twenty One Buttons, “buttons”, boutons, vous avez capté – et sur ces photos-là en fait y a des boutons et quand vous cliquez sur les boutons y a un lien qui s’affiche et quand vous cliquez sur le lien c’est directement euh genre euh “où est-ce que j’ai acheté le vêtement”, donc c’est vraiment trop trop bien par exemple si je fais une photo de mon pull sur l’application y aura un bouton j’vais cliquez d’sus et vous aurez directement le lien d’où est-ce que j’ai acheté ce pull du coup c’est archicool parce que tous ceux qui m’ont demandé les vêtements de chais pas qui de chais pas quoi eh ben c’est archifacile de les retrouver grâce à c’t’application-là en plus c’est une application qui n’est pas du tout réservée qu’aux influenceurs c’est-à-dire que si vous vous créez un compte vous pouvez aussi poster des photos avec, avec vos vêtements et en plus vous pouvez gagner de l’argent parce que chaque personne qui achète vos vêtements via le bouton ou via le lien qui est tracké vous gagnez une part de commission donc c’est archicool… »

Avis à tous les tordus : rendez-nous Paola

Reprenons ensemble notre souffle, et poursuivons. Paola répond maintenant aux « préjugés » que ses lecteurs et lectrices ont sur elle :

« Ensuite un autre préjugé “tu as l’air d’une meuf qui fait la forte mais qui est grave sensible”, c’est totalement véridique chuis une personne archisensible chuis une personne très susceptible genre euh on peut même me qualifier comme étant une personne fragile, je déteste ce mot mais ouais c’est vrai que j’me blesse très vite euh, que j’ressens les choses extrêmement, euh, fortement genre euh chuis hypersensible quoi, j’ai d’l’hypersensibilité du coup j’reçois les émotions à l’extrême genre quand j’rigole j’rigole archifort, quand chuis joyeuse chuis archijoyeuse quand chuis calme chuis archicalme quand chuis triste chuis très très triste… »

Bien. Nous avons à peu près grave saisi de quoi il retourne. Paola fait sa propre étude grave psychologique et se sert du support des réactions qu’elle produit dans son auditoire.

Les lecteurs d’E&R peu familiarisés avec la communication Instagram ou YouTube peuvent grave avoir un choc en regardant ces vidéos, nous déclinons donc à l’avance toute responsabilité sur les conséquences psychologiques éventuelles que ces visionnages pourraient engendrer. Par exemple, lors d’un précédent article sur la cagole philosophe (voir le renvoi plus bas), un lecteur dit avoir perdu la tête. Depuis, il vit prostré, dans le noir, et ne parle plus.

Le succès de Paola a déclenché une ribambelle d’autres études psychologiques par des youtubeurs de tous niveaux médico-psychologiques. En voici une qui s’intéresse au cas Paola en le mêlant à d’autres cas, signée « Tony DSTS », apparemment la règle est de se forger un pseudo hypercool avec son prénom suivi grave d’une abréviation de son nom. Par exemple Paola LCT (ou lct) c’est Paola Locatelli. Archicool, non ?

Tony MST avertit les jeunes paolistes qu’il y a une différence entre la réalité et l’image véhiculée par les influenceuses sexy, il dénonce en gros les trucages de celles qui vendent grave du rêve à des andouilles. Malgré cette réflexion plutôt censée, Tony MST reste fan et il admire ces femmes qui sont des « boss » et qui réussissent à « se faire reconnaître par Rihanna », une chanteuse américaine de ouf qui a été violée et qui adore se montrer dans des tenues grave sexy que les jeunes filles adorent car Rihanna incarne grave la réussite archicool à l’américaine.

Un autre youtubeur un peu moins maniéré et donc un peu plus brut de décoiffage fait la sociologie clinique du phénomène Paëlla et tente de prévenir ses fans du danger d’admirer quelqu’un qui n’est pas vraiment réel. Il a du mal à exprimer son idée mais il y arrive presque, après beaucoup d’efforts (le manque de vocabulaire s’apprend dans les écoles publiques de la République des francs-maçons et des pédophiles) :

Après ce tour d’horizons sociologico-psychologiques divers, vient le moment de notre analyse.

Après ces trois visionnages, certains vont espérer une guerre atomique mondiale qui va rayer toute vie à la surface de la Terre, et faire émerger les calmars ou des bestioles de ce genre qui reprendront le flambeau de la Vie tellement l’Homme aura déconné.

D’autres, plus lâches ou moins « feu d’artifices », prieront pour un choc Terre-comète qui leur permettra de ne pas payer les traites de la maison, de l’appart, de la bagnole ou de l’épouse, plus la prochaine redevance télé sur laquelle le sympathique Griveaux, l’homme qui a fui son ministère en chiant dans son froc un samedi de Gilets jaunes, nous offre un euro de baisse.

Nous disons à tous ces pessimistes qui ne croient plus en l’Homme « non », l’humanité n’est pas foutue. Il reste de l’espoir. Il reste une chance que toutes les Paëllas du monde recollent un jour avec l’Intelligence, ou au moins le second degré. Elles ont le premier, le diplôme de base, c’est déjà ça, et en cela elles sont à égalité avec le calmar.